Qui n'a jamais ressenti l'envie irrépressible de
manger au bruit de la cloche de ses émotions, tel le chien de Pavlov, lira cet
article sans passion, les autres le dévoreront.
La prévalence de la "frénésie alimentaire"
dans les troubles bipolaires est notable :
"La comorbidité du BED et de la
maladie bipolaire n’a encore été que peu étudiée mais la
prévalence du Binge Eating Disorder (BED)
semble 7 à 8 fois supérieure dans le trouble
bipolaire à celle observée en population générale. Il est intéressant de
noter que le BED
précède souvent dans sa survenue le trouble
bipolaire. Ces comportements pourraient être en rapport avec
une automodulation de l’humeur, les compulsions alimentaires
agissant comme un mécanisme compensateur
par l’intermédiaire de l’action des hydrates de carbone sur
le système sérotoninergique."
L’Encéphale, 2006 ; 32 : 511-4, cahier 2
- L'impulsivité alimentaire est cette envie réflexe de manger lorsque
certaines émotions surviennent. Elle résulte d'un mécanisme, un
conditionnement, un renforcement négatif qui a eu lieu (au cours
de la vie), l'aliment, dès lors, permet de soulager un état de
tension émotionnelle. Mais elle empire, plus ce mécanisme est
sollicité, plus il sera sensible à la moindre émotion, même la plus faible
et la dépendance aux aliments s’accroîtra.
- De plus, ce mécanisme entraîne avec lui des émotions négatives (celles
de craquer, de ne pas avoir de volonté, de grossir ou peur de grossir...),
qui accentuent le phénomène. Cercle vicieux dont il est
difficile de sortir et qui entraîne une intolérance émotionnelle de
plus en plus importante
- Face à cela, 2 comportements :
- tenter de réduire les déclencheurs émotionnels
- tenter de lutter contre les envies de
manger.
qu'il est difficile de tenir et dont on sort la
plupart du temps grands perdants.
- Une 3 ème voie proposée par le DF ZERMATI :
- augmenter la tolérance du patient à ses inconforts
émotionnels
- l’entraîner à mieux supporter ses émotions, les
observer et non s'y soustraire avec des prises alimentaires.
"Pour utiliser une métaphore, nous pourrions
imaginer nos patients engagés dans une fuite en
avant pour tenter d’échapper à une vague émotionnelle qui les poursuit. Malgré
tous leurs efforts, ils finissent toujours par être
rattrapés et submergés par cette émotion. Une autre solution serait d’arrêter de
courir et de se retourner pour faire face à la vague, l’observer venir et la
laisser passer. Mais résister à la force d’une vague sans être emporté
par celle-ci n’est pas si simple. C’est à ce moment qu’il faut pouvoir disposer
de ressources, ou en construire de nouvelles, afin de se maintenir, sans
chercher à s’enfuir, dans cette situation d’inconfort émotionnel.
La
pleine conscience nous entraîne à observer et accueillir nos
émotions. Cette technique nous apprend à détecter les sensations physiques et
les pensées désagréables qui les accompagnent, à les observer avec une
curiosité détachée et sans jugement. Elle nous permet ainsi de nous maintenir
dans des situations d’inconforts physiques et émotionnels et d’augmenter ainsi
notre tolérance à ces situations."
Les programmes de thérapie basés sur la pleine conscience sont validés pour
de nombreuses indications et présentent des résultats intéressants. Ces
programmes ne sont actuellement pas adaptés pour être appliqués tels quels aux
troubles du comportement alimentaire. Ils constituent néanmoins une piste très
sérieuse de réflexion pour la prise en charge de l’impulsivité alimentaire.
"
Source : Jean-Philippe ZERMATI
Médecin, Psycho nutritionniste, Psychothérapeute
En 1998, a créé avec deux psychiatres les Docteurs
Gérard Apfeldorfer et Bernard Waysfeld, le Groupe de Réflexion sur l'Obésité et
le Surpoids. A l'origine, le but de cette association était de réunir des
praticiens médecins généralistes ou spécialistes, diététiciens, psychologues,
infirmiers...opposés à la pratique des régimes amaigrissants qu'ils
jugeaient inefficaces et dangereux pour la santé et pour le poids.
Progressivement l'association s'est imposée comme un lieu d'échanges, de
réflexion et de formation. Elle a surtout développé l'approche
bio-psycho-sensorielle, une nouvelle prise en charge du surpoids et des
troubles alimentaires.
- Vidéo sur les envies émotionnelles de manger :