« Elle peut se lever la nuit et aller tuer ses enfants !» Scène de #discrimination ordinaire au Tribunal. #psychophobie (EDITO JUILLET 2019)
La psychophobie : discrimination fondée sur les
stéréotypes à l’égard des personnes catégorisées comme souffrant de troubles
psychiques.
« Elle peut se lever la nuit et aller tuer ses
enfants !»
Cette phrase a été prononcée cette semaine devant un juge
par une avocate en parlant de la femme de son client dans le cadre d’une
procédure de divorce.
Cette phrase a été prononcée à l’encontre d’une personne qui
n’a jamais commis d’actes délictueux mais qui a un diagnostic de troubles
bipolaires.
Cette phrase a été prononcée en toute impunité et sans
objections particulières des personnes présentes, une discrimination ordinaire.
Une phrase qui montre qu’on peut accuser quelqu’un d’être un
potentiel tueur d’enfants sur la seule base d'un diagnostic de trouble psychique, soit 1
français sur 5, 12 millions de français.
Une phrase qui accuse, qui diffame, qui porte atteinte à
l'honneur d’un individu mais qui pourtant n’a fait bondir personne dans cette
salle du tribunal.
En 2019, le fait qu’une personne ayant un trouble psychique soit
vue et décrite comme une démente hystérique, le couteau entre les dents, ne
choque pas. On peut être légitiment inquiet.
La lutte contre la stigmatisation des maladies psychiques
est dans le vent dans les milieux de la santé mentale, mais il faut croire que
cette frêle brise n’ait pu se frayer un chemin jusqu'à cette salle d'un Tribunal d’une grande ville
de France.
Il y a urgence à mettre fin à ces préjugés et idées fausses
qui attribuent des défauts collectifs à un groupe retirant ainsi aux individus
qui la composent toute singularité, donc – ne nous y trompons pas - toute Humanité.
La discrimination est le fait de séparer un groupe humain des autres en le
traitant plus mal. Il y a les
discriminations « habituelles » : racistes, religieuses, sexuelles…et
il y a cette discrimination à l’égard des personnes ayant des troubles psychiques
qu’on appelle : la « psychophobie ».
Ici, elle semble plus large et plus inquiétante, puisqu’il y
a projection d’une dangerosité supposée qui pousse à demander à un Juge qu’une
mère soit séparée de ses enfants sur la seule base d’un stéréotype.
Si l’on va plus loin, avoir peur d’un groupe identifié
et identifiable est très dangereux en soi comme l’Histoire nous l’a prouvé
tragiquement. Cette peur peut devenir
une justification pour commettre l’impensable avant que les membres de ce
groupe ne passent à l’acte avant nous…
. De sinistre mémoire, Charles IX se résolut au massacre de la
St Barthelemy, par peur que les Huguenots eux-mêmes passent à l’acte les
premiers (sur la base de fausses informations) …
. Nul besoin de donner les multiples exemples tragiques du 20ème
siècle, violences, massacres, génocides basés sur la peur d’un groupe qu’on
affuble de multiples stéréotypes, qu’on stigmatise, dont on a peur et qu’on cherche à mettre hors d’état de nuire…
La comparaison parait exagérée, et pourtant l’accusation de l’avocate
était de cet ordre-là « aller tuer ses enfants la nuit !».
« Santé Mentale et Discrimination », c'est le sujet
de la prochaine prochaine SISM 2020, gageons et espérons qu’elle sera
l’occasion de nombreux débats fructueux médiatisés au-delà des milieux
habituels de la santé mentale. Des campagnes seraient les bienvenues, des
plaquettes, des affiches, des spots et que sais-je encore.
Le grand public, les professionnels, tous, doivent être
avisés pour que changent les mentalités, pour que « trouble
psychique » ne soit plus égal à « meurtrier » en puissance, violent,
hystérique, mauvais père ou mauvaise mère…. Vu et traité comme tel.
Un chemin à parcourir, un combat à mener, une lutte longue
et parfois décourageante, mais nous n’avons pas le choix :
« Une
injustice, où qu'elle se produise, est une menace pour la justice partout
ailleurs, car nous sommes tous pris dans un tissu de relations mutuelles. »
Martin Luther
King.
ED
29.06.2019
Fondatrice Mouvement et Association Psy'hope
Texte de référence :
Cas constituant une discrimination
« Sont interdits
toute distinction ou tout traitement inégal fondés sur :
- Origine
géographique, nom de famille, lieu de résidence
- Appartenance
ou non-appartenance, réelle ou supposée, à une ethnie ou à une nation
- Langue
parlée (autre que le français),
- Sexe
ou identité de genre
- Situation
de famille, grossesse ou maternité
- Orientation
sexuelle ou mœurs
- Apparence
physique,
- Âge
- État
de santé, handicap, perte d'autonomie
- Caractéristiques
génétiques
- Religion,
convictions politiques ou activités syndicales
- Précarité
de sa situation économique. »